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Propositions d'article sur la vie après le séisme en Haiti

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Message par creol971 Mer 30 Nov 2011 - 16:55

Volontaire de mon hôpital pour porter secours à nos voisins haitiens, j'aimerai faire un article sur la situation après le séisme et sur comment survive lorsque une ville (capital du pays en plus) s'effondre et tout n'est que ruine.
Je plante un peu le décor :
- Le centre décisionnel du pays est en ruine (palais présidentiel et divers bâtiment de l'armée également), au bout de deux à trois semaines, le centre névralgique des décisions est transféré à 100km. C'est deux semaines où vous êtes livrés à vous même. C'est extrêmement long ... et je ne vous cacherai pas que j'ai eu la trouille de ma vie à ce moment là.
- Les moyens de défense sont en parti détruit et les soldats sont en parti décédés. Ce qui diminue d'autant le nombre d'individus disciplinés et capable de maintenir l'ordre.
- Les moyens de communication sont détruits ou dans l'impossibilité de fonctionner. Les routes sont impraticables. Nous avons été privé d'électricité pendant 2 mois, rendant encore plus difficile les interventions chirurgicales.
- Les ressources naturelles d'alimentation et de subsistance sont détruites, dans certains cas définitivement (cocotiers et autres arbres fruités déraciné), la terre est gorgée d'eau et rien dans l'immédiat ne pourra y pousser.
Les eaux et rivières sont potentiellement contaminées.
- Les secours sont surchargés et sous équipé par rapport à l'ampleur du phénomène, couplé au fait que les hôpitaux, et autres soins de santé sont pris d’assaut.
Je précise également que toute activité économique est impossible ce qui fait qu'un pays entier se retrouve au chômage. Les banques sont fermées. Les commerces pillés.

Inutile de préciser que dans des moments pareils, l'homme devient un loup pour l'homme car son instinct de survie prend le dessus.
En d'autres termes c'est le black out.
Les principaux risques ont été selon moi en terme d'importance :

- Ne pas me faire kidnapper.
- Me protéger des dangers (violence, viol ... et oui, alimentation et eau douteuse, maladie virale)
- Trouver un endroit sur pour dormir et passer ses 4 mois.
- Pouvoir communiquer avec ma famille.

Avant de commencer ce témoignage j'aimerai savoir si vous avez des demandes particulières ou souhaitez des précisions.


Dernière édition par creol971 le Mer 30 Nov 2011 - 17:32, édité 2 fois
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Message par resistance34 Mer 30 Nov 2011 - 17:21

Tu commences fort CREOL ! POur ma part, je serai ravi d'en savoir plus sur ton expérience avec un maximum de détail.

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Message par tarsonis Mer 30 Nov 2011 - 17:59

Salut !
Merci de proposer ton retour d'expérience Propositions d'article sur la vie après le séisme en Haiti 310536
creol971 a écrit:
Avant de commencer ce témoignage j'aimerai savoir si vous avez des demandes particulières ou souhaitez des précisions.
Personnellement, deux point m'intéresseraient en plus de ceux que tu as cité Propositions d'article sur la vie après le séisme en Haiti 310536

creol971 a écrit:
- Les moyens de communication sont détruits ou dans l'impossibilité de fonctionner. Les routes sont impraticables. Nous avons été privé d'électricité
Les eaux et rivières sont potentiellement contaminées.

Comment avez-vous pu gérer les communications entre les différents intervenants médicaux (localement et à distance antenne locale/hôpital, etc...) ?
Comment avez-vous pu gérer l'épidémie de choléra (traitement, prophylaxie, etc) ?

Merci d'avance ! Propositions d'article sur la vie après le séisme en Haiti 310536

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Message par Ash Mer 30 Nov 2011 - 21:15

Et pour le logement, le système de sécurité utilisé, surtout au niveau de la stratégie, de l'organisation... Ainsi que tout le reste, merci!

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Message par BigBird Mer 30 Nov 2011 - 21:18

idem, hate de lire ton retour d'expérience ! Smile
le problème de l'eau potable, de l'approvisionnement en denrées alimentaires, ... comment palier à l'absence de monnaie disponible, ... troc ?
transport, funéraille, ... bref, tous les "plans B" mis en oeuvre quand tout le système socio-économique défaille ...

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Message par Athea Mer 30 Nov 2011 - 21:26

Aviez-vous déjà un réseau de contacts toujours présents parmi la population locale sur qui vous appuyer ou étiez-vous seulement entre vous?

Comment avez-vous dû créer ou renforcer cet appui : logistique? langue? nouriture? contact avec des autorités ou chef local? formation sur le tas?

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Message par creol971 Jeu 1 Déc 2011 - 2:10

Je vais répondre tout de suite à vos demandes même si par la suite j’y réponds également dans mon récit.

Comment avez-vous pu gérer les communications entre les différents intervenants médicaux (localement et à distance antenne locale/hôpital, etc...) ?
Notre centre de santé (un hôpital gonflable) était intégré au réseau de médecins sans frontière, lui-même intégré à d’autres ONG spécialisé dans la logistique de crise. Notre chance c’est que les légionnaires bâtisseurs étaient là pour nous filer un coup de main. Le régiment de Guadeloupe est venu les premières semaines, nous avions donc des talky walkies améliorés avec plusieurs fréquences. Je ne connais malheureusement pas le nom de ces appareils, mais le génie avait sa fréquence, la santé sa fréquence etc … Nous avions également régulièrement des staffs le soir à 18h

Comment avez-vous pu gérer l'épidémie de choléra (traitement, prophylaxie, etc) ?
Par des bouteilles d’eau et produits manufacturés. L’eau en bouteille et le meilleur moyen de se protéger. A défault on fait bouillir l’eau pour le reste ou dans un cuve spéciale de 20 L qui se gonfle au fur et à mesure qu’il y a de l’eau dedans. On peut ainsi la traiter avec des pastilles de clhore.
Sans ça, il faut bouillir l’eau. A titre personnel je ne me suis pas fait vacciner. Nous n’avons pas eu à déplorer de maladies.
Pour la population, il a fallu trouver les sources contaminés et le traitement étaient essentiellement à base de perfusion d'eau stérilles avec divers éléctrolytes (potassium, sodium) sur 4 à 7 jours.

Et pour le logement, le système de sécurité utilisé, surtout au niveau de la stratégie, de l'organisation... Ainsi que tout le reste, merci!
Nous étions logés dans des camps (tentes militaires) en fonction de notre spécialisation. Nous étions quasi tous exclusivement au niveau de l’aéroport, d’autres ong étaient en centre ville. Malheureusement ils étaient également logés dans des camps et pour certains il y a eu des enlèvements, voir des viols.

L’aéroport cumule nombre d’avantage en tant que solution de repli. Il est aménagé en conséquence, il dispose de véhicules et d’appareil de secours, il se situe dans un endroit dégagé, et il permet d’avoir une vision à 360°. Bien entendu, il faut des troupes et une population disciplinées pour en faire un bon lieu stratégique.
Il nous a servi de plate forme d’échange et de communication assez vite. Mais pendant deux semaines, il a fallu refaire la piste d’atterrissage principale afin de faire venir vivre et matériel.
Le président de la république haitienne et ses ministres étaient également dans l’aéroport.

La défense étaient assuré d’abord par l’armé française puis par l’ONU, quand nous avons compris que les américains prenaient possession des lieux nous sommes partis en périphérie, aucun d’entre nous ne voulaient se retrouver à Port aux Princes. D’ailleurs le premier endroit qu’ils ont investi étaient l’aéroport.

Pour notre sécurité nous avions nos talki walki qui étaient sensible à l’inclinaison, si je me couchais en oubliant de le poser debout il sonnait, ensuite un gars de la sécurité m’appelait dessus. J’avais par contre toujours mon opinel sur moi attaché au niveau de la cheville. Mon couteau suisse toujours dans ma poche.
Pour la sécurité il y avait les gardes de sécurité, et l’armée. Interdiction de pénetrer dans l'aéroport, ils tiraient à vu. Beaucoup de prisionnier se sont échapés et ont formé des milices ultra violentes spécialisé dans le kidnaping. Nous avons été régulièrement leur cible.

Enfin la coopération est le maitre mot, il faut venir avec sa spécialité, chaque personne sait ce qu'il a à faire. Un ami militaire et charpentier de son état, à réaliser à lui seul des merveilles et fabriquer divers abris qu'ensuite d'autres professionnels ont terminé. A titre d'exemple, un abri en bois de 5*7 metres construit en 2 jours.


le problème de l'eau potable, de l'approvisionnement en denrées alimentaires, ... comment palier à l'absence de monnaie disponible, ... troc ?
transport, funéraille, ... bref, tous les "plans B" mis en oeuvre quand tout le système socio-économique défaille ...
Alors là effectivement c’était compliqué. Au départ j’ai tapé dans mes réserves perso pour m'aliementer, par la suite, les guadeloupéens et martiniquais et guyanais ont envoyé des denrées par bateaux. Des bateaux personnels en faite, rempli d’objets et denrées de diverses quêtes en tout genre. Par la suite tout arrivait par l’aéroport.
Des spécialistes de l'eau sont venus avec de grandes cuves pliables (50 L à 500L) et une mini station d'épuration fonctionnant avec 3 employés. Bien entendu ce n'est pas la même qualité que l'eau courante, mais l'eau est "propre" à défaut d'être potable. et une fois bouilli à la cuisson, celà ne posait plus trop problème.

La quasi disparition de la monnaie posait en effet le problème des échanges. Et avec l’arrivée en masse de produits qui venait de la planète entière il a vite fallu donner des tickets de rationnement aux familles. Problème supplémentaire, il n’y avait plus aucun moyen de contrôle puisque plus d’archives sur les familles, plus d’adresses, bref rien pour contrôler. Donc au départ les ressources étaient contrôlées par les ONG puis par les locaux puis dans divers réseaux de distribution. Le troc est apparu assez vite la violence avec, et les banques n’ont pointé leur bout de leur nez qu’au bout d’un moins, sans possibilité de retrait.

La monnaie après, était un moyen d’échange en plus du troc, d’abord l’euro et assez vite le dollar. Quand le système s’écroule, le troc refait son apparition et une nouvelle économie avec de nouveaux acteurs se mettent en place. Je développerai ce point un peu plus dans une autre partie. Jusqu’à maintenant, le système ne s’en est pas encore remis. Il n’y a pour ainsi dire, quasiment plus d’activités économiques au sens moderne du terme. Es gens sont toujours sous des tentes et rien n’a été reconstruit. Ceci dit les banques ont repris leur rôle.

Les enterrements ont été le symbole d’Haïti déshumanisé. Les corps ont été enterrés à la vie vite. Parfois brulé faute de mieux. Parfois, ils sont restés là.

Aviez-vous déjà un réseau de contacts toujours présents parmi la population locale sur qui vous appuyer ou étiez-vous seulement entre vous?
Nous avions des contacts, là c'est d'hôpital à hôpital, mais beaucoup d’entres eux ont succombé. Nous avons fait un peu à notre guise au départ. Le gouvernement était totalement défaillant à ce niveau. Par la suite nous nous sommes fédérés entre ONG et bénévoles et la population locale.

Comment avez-vous dû créer ou renforcer cet appui : logistique? langue? nouriture? contact avec des autorités ou chef local? formation sur le tas?
Pour la langue, les haïtiens sont polyglottes, ils parlent français, créole, anglais et parfois espagnol. Pour l’appuis logistique, les ONG sont rodés et au final ca donne un truc qui roule tout seul. Les autorités ne nous ont pas été d’un grand secours, à vrai dire les décisions se jouaient ailleurs, d’abord en France, puis à Washington.

La formation sur le tas est quasi impossible, c’est d’ailleurs une des raisons que l’on ma donné pour expliquer la présence des légionnaires à nos côtés enfin, il y a les professionnels sur place. En faite, il faut avoir une expertise clinique dans sa spécialité pour venir.
Par exemple, un gars du génie, va constater différents problèmes, il va les prioriser, se donner des objectifs chiffrés et temporalisés, et ensuite mettre un plan d’action. Sa démarche sera connue de ces supérieurs puis des autres acteurs du camp ce qui permettra de pouvoir agir en conséquence.
La coordination et la diffusion d'information sont les clefs pour réussir.


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Message par creol971 Jeu 1 Déc 2011 - 2:13

Je vais faire ce sujet en trois parties

1) La première, préparation du voyage, et tenter de répondre à cet instant T à la problématique suivante : Que mettre dans son sac à dos et ses bagages?
2) La deuxième est la survie en milieu dévasté, et même si j’étais dans un hôpital « gonflable » et dans une zone relativement protégée, vous verrez que ce n’était pas aussi évident.
3) La dernière est une analyse de mes erreurs et des choses à améliorer
La préparation au voyage.

Autant, un sac de rando ne me pose plus trop de problèmes, ni même un sac de rando spécial paramédical pour le sauvetage d’individu et premiers soins. Autant préparer ses bagages pour partir à l’aventure dans un pays ravagé a été vraiment problématique.

Après plusieurs essais j’ai décidé de tenir compte du fait que :
- Je serai logé et nourri.
- Je serai dans une zone sécurisé et médicalisé.
- J’aurai un certain confort pour vivre pendant quelques temps.
- Au pire, je pourrai me réfugier à l’ambassade française.

Etant assez tétu Very Happy j’ai quand même rajouté certains éléments et réparti mes affaires de cette façon :
- Mon sac à dos de randonné que je connais sur le bout des doigts
- Un sac de sport de grande taille que je connais par cœur également
- Le tout pour un maximum de 30 kilo

J’ai opté pour cette organisation afin d’avoir toujours sur moi mes affaires et de pouvoir partir en courant avec à tout moment. Je précise avant de commencer que je suis allergique au poisson, donc pas de kit de pèche.
Dans mon sac à dos (40L), j’ai
- une petite mallette de premier soin personnel (3 tailles de 6 pansements lavables, des compresses stériles, du sérum phy en unidose, du sparadrap, un ciseau, une paire de gants, différents antalgiques et anti inflammatoire, des médocs de types malox , des médicaments pour protéger le tube digestif, ma ventoline et des médicaments contre les allergies couplé à un médicament particulier l’atharax qui est un anxiolytique mais agit également contre les allergies à titre préventif lors des anesthésies et il protège le coeur pendant la dite anesthésie) beaucoup de pastilles pour filtrer l’eau et du gel antibactérien pour les mains 1kg
- Une lampe frontale et une lampe de poche avec pile rechargeable et chargeur solaire 2KG
- La popote deux couverts décathlon avec deux verres en plastique et couvercle et sav poubelles à l’intérieur 1Kg
- Une couverture de survie 3*3m, une serviette absorbante 600g.
- Un bas de jogging et un haut de jogging et un tarp XL, des rideaux très fins troués coupés en longueurs (2 fois 2 mètres de longueur sur 1 m de largeurs) qui me serviront de moustiquaires ou de tapis de sol ou pour n’importe quoi d’autre. Un rouleau en bambou pour préparer les sushi (lol) qui m’a déjà servi de tapis de sol pour mon sac, de dessous de table et même de filtre à eau (retirer grossièrement les gros cailloux) 2Kg.
- 4 bougies en pots protégé du vent, un couteau suisse, un couteau pliable de type opinel, un couteau de type bushcraft avec allume feu et sifflet rajouté de bonne facture, une scie pliante de base et une hachette 4kg.
- Un briquet, des boites d’allumettes, des petites piles de rechange et de la cordelette avec un petit kit à couture. Une bombe lacrymogène, une gourde d’1l 1kg
- Une tente deux places de 2kg et une bâche légère 3*4m, 1kg.
- Réchaud et quatre petites recharges au cas où et un petit stock de bouillon (4 tablettes de 20), de la semoule, et des barres de céréales pour 5kg


Ce qui nous fait : 1+2+1+0.6+2+4+1+2+1+5 soit : 20kilo environ que j’ai senti passé Very Happy


Le sac de sport contient quant à lui essentiellement des vêtements de sports et une paire de basket de rechange et une bâche supplémentaire, un matelas autogonflant, une deuxième mallette de soins avec des antibiotiques en IV(amoxicilline) des en plus et deux set à perfusion avec 3 poches d’un litre de serum physiologique, thermomètre et appareil à tension au poignet ainsi qu’une boite de masque chirurgicaux . Trois draps et un petit sac à dos de taille normal, vide plié dans ce même sac. 10 kilo.

En plus un sac d’ordi contenant un téléphone portable quadribande, une clef usb avec la photocopie de mes papiers, mon passeport (uniquement) et une attestation de sécu. Un ordi portable avec quelques films, des jeux et des livres numériques. 500 euro.

Voilà, je suis pret à partir.


Dernière édition par creol971 le Jeu 1 Déc 2011 - 3:12, édité 1 fois
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Message par creol971 Jeu 1 Déc 2011 - 2:16

La suite demain lol clind'oeil
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Message par BigBird Jeu 1 Déc 2011 - 3:41

un grand merci pour ce témoignage captivant,
tu y as été à partir de quand et jusqu'à quand ?
(es-tu toujours sur place en Haïti ?)

j'attend la suite avec impatience, ...
enfin, prend ton temps quand-même, hein ! Smile
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Message par creol971 Jeu 1 Déc 2011 - 14:17

La survie en milieu dévasté, organisation et pratique au jour le jour.

Nous étions installés exclusivement sous des tentes sur un terrain non balisé au départ, par la suite nous ne dormions que dans les tentes avec un campement balisé de bois et de fil de fer électrifié.
Ce qui est marrant est que chaque ONG a plus ou moins son modèle de tente, les télécoms sans frontière ont plutôt des tentes en forme de tunnel, nous c’était les tentes blanches des secouristes, les légionnaires dormaient sous des abris qu’ils avaient eux même fabriqué …

Les premiers jours, nous avons plutôt fait de la bobologie. En effet il fallait laisser le temps aux électriciens d’installer les premiers groupes électrogène et divers panneaux solaires. Les télécom ont embrayé dans les deux jours en installant les antennes parabolique et les supra antennes. En trois jours j’avais la possibilité d’appeler avec mon téléphone portable, je pouvais me connecter sur internet et nous avions maintenant la possibilité d’être opérationnel en chirurgie, anesthésie et réanimation. Le troisième jour, l’hôpital gonflable était là les pharmaciens sans frontière nous ont rejoint. Des employés d’une station d’épuration sont venus épauler les militaires pour l’installation de la station dépuration portative. Les militaires, toujours, étaient venus avec un stock conséquent de nourriture, mais aussi du bétail comme des porcs, des vaches laitières et des poules. Je crois que ce qui m’a marqué le plus dans cet expérience, c’est qu’il est plus facile de survivre à plusieurs que seul. C’est une évidence qui vous cogne à la figure. L’ampleur des tâches à réaliser est tout simplement énorme.

Pendant ce temps, le génie s’est, dans l’ordre, occupé de refaire la route de l’aéroport, puis de fabriquer un accès maritime de fortune, enfin des routes stratégiques : aéroport > ambassade, aéroport> ancien hôpital, aéroport> centres de distribution alimentaire.

Les locaux sont venus nous donné un coup de main. Au départ l’armée ne voulait pas, mais nous manquions de main. Il a fallu faire un cimetière pas loin de l’aéroport afin que les personnes décédées puissent avoir un enterrement digne. Le plus souvent nous ne savions même pas qui nous avons enterré alors nous prenions des photos, plus les photos du profil dentaire et nous gardions certains effets comme des bagues ou collier pour des identifications ultérieurs.


La première semaine s’est bien passé, par la suite, ca été l’horreur.
L’eau est redescendu, les secours sont en permanence sur les lieux, la terre tremble plusieurs fois par jours et le peuple a faim. Très faim. Les prisonniers sont dehors, et les anciens tontons macoute ont des comptes à régler. Nous avons du subir leurs assauts au moins 3 à 4 fois par jour. Si bien qu’un instructeur militaire nous a appris à nous défendre, assez radicalement j’avoue. La faim aidant, ces bandes organisées étaient hyper violente, très mobile et s’adonnaient au pillage de tout ce qu’ils pouvaient trouver.
Les tentes qui permettaient aux haïtiens d’avoir un toit temporaire étaient devenues une zone de total non droit. Faute de justice et de police locale, rien ne pouvait les empêcher d’agir. Il n’y avait pas de gouvernement non plus. Nous avions ordre de ne pas quitter nos campements. Certains ont voulu faire un peu de tourisme, leur ambassade a du payer quelques millions d’euro en liquide (pas de banque à ce moment là) d’autres ne sont tout simplement pas revenus. Enfin des bénévoles ou des locaux se sont fait manger par des pratiquants du vaudou (la faim, toujours la faim)
Très honnêtement, je ne pensais trouver ce genre de comportement que dans les films (la route ; le livre d’Elie) mais nous pouvons retourner très vite dans la barbarie perdant vite notion de notre humanité au profit de notre animalité.

Il nous a fallu tenir facilement trois bonnes semaines encore. Par la suite, l’Etat a commencé à pointer le bout de son nez. La police a commencé à faire des rondes et l’ordre est revenu en même temps que les dollars et les euros. C’est une autre leçon que je retiens. Sans monnaie et sans organisation préalable, la population panique et vole. De plus les magasins commençaient à vendre des produits. Même si la population n’avait plus d’argent, le réflexe du consommateur reprenait le dessus. L’activité économique en elle-même n’a pas repris. Avant le tremblement de terre, il n’y avait déjà presque plus d’arbres en Haïti et les cultures agricoles n’étaient les plus réputés. Il a fallu reprendre tout depuis le début, mais comme l’économie s’est effondrée, elle ne doit son existence minimal que par les mandats western union de la diaspora haïtienne. Peut être que dans une dizaine d’année ca repartira mais j’en doute. A très grande échelle, il est assez compliqué d’avoir un plan B. Donc beaucoup de troc et de l’auto suffisance et les aides alimentaires quand on a de la chance d’en avoir.

Les trois mois suivant ont été plus simple à vivre. Les avions arrivaient au rythme d’un toutes les 7 min de jour. La nuit on avait la chance d’avoir le calme. Les bâtisseurs ont pu construire plusieurs abris et une ville artificielle est née de leur main. Nous disposions à présent d’une petite commune avec différents services (boulangerie, épicerie, poste, télécom, cyber café …) ainsi que des moyens de subsistance (fruit, légumes et viande) il me semble que jusqu’à maintenant elle est toujours interdite aux locaux.

Les kidnappings sont devenus courant. Il suffisait qu’un étranger pointe le bout de son nez sans aucune assistance et il avait de grande chance de disparaitre. Ce qui compliquait beaucoup les choses. Car cela mobilisait une partie des forces de l’ordre. Avec un peu d’organisation nous avons pu régler ce problème en les faisant atterrir en Guadeloupe ou en Martinique et en les faisant venir par bateau.
De notre côtés nous enchainions les opérations pour pose de prothèse, suivi des fractures, réanimations etc … J’avoue que parfois c’était assez vite torché.

Un jour nous avons reçu un groupe d’hommes venu pour divers coups de couteau et blessures. Après quelques pansements, ils ont sorti des armes, et nous annonçaient que nous étions leur otage et qu’ils souhaitent parler avec l’ambassadeur américain (j’oubliais de préciser que c’était MSF Miami qui a pris le relais quand les américains ont plus ou moins chassé les français) Mais les militaires américains sont tout sauf des comiques, la suite est donc hors charte.
Grosse frayeur. Et encore et toujours des morts. A la fin on n’y fait presque plus gaffe.
Au bout de 4 mois je suis retourné en Guadeloupe, assez amer et avec le triste constat que ce pays ne se relèvera jamais. A ce jour, la population vit toujours dans les tentes et personne n’est capable de répondre à cette simple question :
« Où est donc passé l’énorme masse d’argent envoyé par le monde entier pour reconstruire ce pays ? »
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Message par Iv@nhoe Ven 16 Déc 2011 - 13:07

Vraiment très intéressante, tout ça. Et effrayant, bien sûr.

Déjà, le pays ne devait pas être dans un super état, avant le séisme. Lire "plus de forêt", mauvaise agriculture...
Les bandes de pillards qui viennent se payer sur les sauveteurs..
Les sauveteurs qui arrivent en masse avec des moyens énormes, et qui auraient été énormes même avant le seisme... cette différence de richesse absolument démente, qui fait que ce qui aurait été étonnant, c'est que justement, le vol et le kidnapping ne soient pas devenus monnaie courante..
Lu aussi le fait que les gardes avaient ordre de "tirer à vu" sur les maraudeurs... je sais qu'il ne faut pas faire d'angélisme, mais c'est quand même assez choquant...
J'aimerais aussi que tu décrives ce que pour l'instant tu ne fais que évoquer marginalement : comment, et pourquoi les américains sont arrivés et ont "chassé" les ONG non américaines....
Ce genre de situation... un petit pays tellement petit qu'un seisme le détruise totalement...
Tu dis que le pays ne se relevera jamais... c'est vrai qu'on a du mal à imaginer comment on peut refaire un pays à partir de rien... mais ça veut dire quoi ? que les ong vont rester ad vitam eternam ? je suppose que déjà, il doit y en avoir un paquet qui sont parties..
Déjà, on peut se demander comment un pays sans bois peut s'en sortir : pas de matériaux de construction, pas de feu... on peut aussi se demander comment faire de l'agriculture dans un pays où la sécurité n'est pas assurée : tes récoltes peuvent être volées d'un moment à l'autre...
J'attends la suite de ton article avec impatiente : en plus, il est bien écrit, merci !

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Message par logan Ven 16 Déc 2011 - 13:50

"Très" intéressant comme retours (et à la fois terribles ..). Et aussi hâte de lire la suite (ta post analyse) ... Merci à toi !

BigBird a écrit:tu y as été à partir de quand et jusqu'à quand ?
Même question.
Et à tout hasard, vu que le monde des ONG est des fois petit, as tu rencontré une "Maylis" sur place ?
Elle est parti fin 2010 à Gonaives pour MSF, puis à d'autres endroits. J'avai posté quelques retours ici.

Au passage, j'en profite aussi pour faire un big UP à une association que je connais un peu et dont on ne parle pas souvent : "Télécoms Sans Frontières" (TSF).
En plus du super travail que font les ONG, Volontaires & Co, on voit bien dans tes retours que les moyens de communication sont aussi primordiaux en temps de crise ..

Sinon autres questions :
- Concernant ton matériel prévu à l'avance : est ce qu'il y a des choses qui t'ont particulièrement manqué et qu'avec le recul tu prendrais ?
- Comment vous alimentiez vous (avant le ravitaillement plus régulier par avions) : nourriture locale (ca devrait etre dificile), rations militaires, réserves emportées (conserves) ?
- Tu parles de l'importance du troc : qu'est ce qui avait le plus de valeur, ou était le plus souvent échangé/utilisé ?
- Concernant les médocs : Maylis me disait que vu leurs faibles stocks et diversité, ils en utilisaient beaucoup pour leur effets secondaires au lieu du primaire. Comme administration d'un médoc destiné à lutter contre une infection, mais avec effet secondaire de somnolence donné à ceux qui n’arrivaient à dormir par exemple., ou pour traiter des troubles psychologiques (calmants, antidépresseur, etc.)
Tu as aussi relevé ce genre d'utilisation détournée qui apparemment était fréquente ? Ça montrerait l'utilité de mieux s’intéresser à tout le spectre de nos médicaments ..

creol971 a écrit:Je crois que ce qui m’a marqué le plus dans cet expérience, c’est qu’il est plus facile de survivre à plusieurs que seul. C’est une évidence qui vous cogne à la figure. L’ampleur des tâches à réaliser est tout simplement énorme.
Remarque importante. Même si on discute souvent ici de ce point, tu re démontres à quelque point c'est essentiel !
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Message par Iv@nhoe Ven 16 Déc 2011 - 15:49

Logan,
Non que je veuille mettre en cause l'importance d'être plusieurs en cas de survie, je pense que ce que décrit Creol971 n'est pas de la survie à l'état pur : le sujet dont il parle est l'organisation de secours dans un pays dévasté : Les secours avaient à priori une logistique importante et disponible, ce n'étaient pas eux qui étaient en survie. La nécessité d'être plusieurs se reportait au fait que... dans un chaos pareil, quand il faut à la fois prendre en charge une énorme population et s'en défendre...

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Message par creol971 Mar 20 Déc 2011 - 20:00

Iv@nhoe a écrit:J'aimerais aussi que tu décrives ce que pour l'instant tu ne fais que évoquer marginalement : comment, et pourquoi les américains sont arrivés et ont "chassé" les ONG non américaines....

....

Tu dis que le pays ne se relevera jamais... c'est vrai qu'on a du mal à imaginer comment on peut refaire un pays à partir de rien... mais ça veut dire quoi ? que les ong vont rester ad vitam eternam ? je suppose que déjà, il doit y en avoir un paquet qui sont parties..
Déjà, on peut se demander comment un pays sans bois peut s'en sortir : pas de matériaux de construction, pas de feu... on peut aussi se demander comment faire de l'agriculture dans un pays où la sécurité n'est pas assurée : tes récoltes peuvent être volées d'un moment à l'autre...
Alors au départ ce sont essentiellement les français qui ont porté assistance au haitiens. Pour des raisons diplomatiques et économiques, les américains sont arrivés également assez rapidement. La raison essentielle étant de tout faire pour empécher la population de fuir vers des pays étrangers en particulier des pays nord américains.

Concernant le devenir économique du pays, Haiti n'a pas "vendu" ses terres comme la république dominicaine et ne s'est pas transformer en bordel américain. De plus ce pays souffre de la fuite des cerveaux comme pour certaisn pasy d'Afrique. Enfin la population est peu voir pas du tout éduqué, et est constitué de bons travailleurs mais sans plus. Et puis il y a le problème de sécurité, les bois ont été coupés pour faire du charbon et malheur à celui qui cherche à en faire pousser, des milices viendront profiter du butin.
L'organisation du pays est propice à la corruption. Si même un prête vole son propre pays, il n'y a que très peu à attendre des élites. La diaspora haitienne envoie beaucoup de d'argent mais revenir au pays est une tout autre histoire. Quitter le confort new yorkais pour la misère et manger des galettes de boue, le choix est vite fait.

BigBird a écrit:tu y as été à partir de quand et jusqu'à quand ?
Je me suis porté volontaire le lendemain du séisme. Nous sommes arrivé une semaine après.

logan a écrit:Et à tout hasard, vu que le monde des ONG est des fois petit, as tu rencontré une "Maylis" sur place ?
Non, je ne crois pas l'avoir connu, mais il est vrai que pour ce qui est des médicaments, sa valeur marchande était inestimable. Nous n'en avions pas énormément non plus. D'abord car il fallait etre très prudent au niveau des stupéfiants
(morphine, tranquilisants et anesthésiants) car sa tracabilité est assez complexe pour ne pas dire, administrativement compliqué, et parceque ce sont des produits tentants pour qui peut être dépandant à l'alcool ou divers drogues. Il n'était pas rare de recevoir 4 boites de morphine alors qu'on en attendait 6. Les soldats faisaient leur strock perso, d'autres se shootaient avec.... Rolling Eyes

logan a écrit:Sinon autres questions :
- Concernant ton matériel prévu à l'avance : est ce qu'il y a des choses qui t'ont particulièrement manqué et qu'avec le recul tu prendrais ?
- Comment vous alimentiez vous (avant le ravitaillement plus régulier par avions) : nourriture locale (ca devrait etre dificile), rations militaires, réserves emportées (conserves) ?
- Tu parles de l'importance du troc : qu'est ce qui avait le plus de valeur, ou était le plus souvent échangé/utilisé ?
- Concernant les médocs : Maylis me disait que vu leurs faibles stocks et diversité, ils en utilisaient beaucoup pour leur effets secondaires au lieu du primaire. Comme administration d'un médoc destiné à lutter contre une infection, mais avec effet secondaire de somnolence donné à ceux qui n’arrivaient à dormir par exemple., ou pour traiter des troubles psychologiques (calmants, antidépresseur, etc.)
Tu as aussi relevé ce genre d'utilisation détournée qui apparemment était fréquente ? Ça montrerait l'utilité de mieux s’intéresser à tout le spectre de nos médicaments ..
Alors pour le matériel, je finis d'écrire mon article que je mettrai en ligne au plus tard demain.

Pour l'alimentation, on mangeait de rations militaires. Personne ne voulait manger au départ, la nourriture locale.

Au niveau du troc, ce qui avait le plus de valeur, c'était les céréales, en particulier le blé. Venait ensuite les autres cérales comme le riz ou les céréales modifiés comme les pates alimentaires. D'une manière générale totu ce qui pouvait se manger avait de la valeur.
Les armes n'étaient pas une monnaie d'échange mais le bien le plus demandé, quelque soit sa forme. Avoir une arme était vitale.
Au niveau des échanges, il y avait bien sur la nourriture contre à peut près n'importe quoi. L''or, les bijoux tous les objets auquels nous donnons de la valeur n'avaient plus court au début. C'était de vulgaires objets. Par contre de la nourriture contre de la nourriture était un marché honnête.
Pour le reste c'est assez classique des situations d'extrêmes pauvreté et de catastrophe naturelle de grande ampleur. Le riche propriétaire échange de la nourriture à une milice en guise de protection. La prostitution, le trafiic d'enfants ... d'organes ... tout s'échange.

Les médocs : Et bien ils ont généralement plusieurs indications mais surtout plusieurs effets secondaires en fonction des doses administrée.
Nous utilisions beaucoup la morphine en période de choléra. Nos anti diarrhétique n'étaient pas assez puissant en dose normale, et si on augemente la posologie il y a un risque d'effets secondaire qui est le trismus (mais réversible) : Primperan Aussi nous utilisions la moprhine afin de constiper les patients : effets secondaires de la morphine
Mais il est assez compliqué justement de jouer avec les effets secondaires des médocs, après c'est une question de posologie et il vaut mieux ne pas trop s'y risquer. Le problème est que sur place, tu fais avec ce que tu as comme stock de médoc. Donc faut agir.
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Message par creol971 Mar 20 Déc 2011 - 20:08

Iv@nhoe a écrit:Logan,
Non que je veuille mettre en cause l'importance d'être plusieurs en cas de survie, je pense que ce que décrit Creol971 n'est pas de la survie à l'état pur : le sujet dont il parle est l'organisation de secours dans un pays dévasté : Les secours avaient à priori une logistique importante et disponible, ce n'étaient pas eux qui étaient en survie. La nécessité d'être plusieurs se reportait au fait que... dans un chaos pareil, quand il faut à la fois prendre en charge une énorme population et s'en défendre...

En faite c'est valable dans les deux cas. Very Happy Car c'est une réfléxion qui m'a permis de murrir sur mes aspirations de survivaliste. Plus question de contruire ma petite cabane dans un coin et de laisser le monde s'écrouler. De part quelques sorties buscraft je sais me débrouiller sur certains aspects artisanaux des constructions, mais si une personne plus douée que moi s'en occupe, je lui laisse volontier la charge pour me consacrer à d'autres points tout aussi important afin d'optimiser la survie du groupe.
Je n'ai pas de fil de fer ou de cuivre dans mon sac de sorti, mais un compagnon en a lui et il sait très bien quoi faire avec, alors que moi affraid lol.

Dans le cas des camps des ONG, l'organisation était tout autre. En petit commité, même si chacun à son rôle, on donne tous un coup de main au camp. Là je n'ai pas aidé un technicien sur quoi que ce soit. Même pas pour lui apporté un tourne vis. J'avais ma place dans les soins et c'est tout. Même, quand il fallait de la force physique pour soulever des poutres ou autres objets lourds, les légionnaires avaient déjà construit des engins en bois façon moyen âge pour déplacer tout ça.
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Message par creol971 Ven 30 Déc 2011 - 21:40

Pour finir

La vie au camp :

L’hygiène :
L’eau était traité par des unités mobiles de traitements d’eau, on avait également une station légère d’eau potable. Sinon l’eau était traitée par des pilules ou par ébullition en fonction des besoins ou des disponibilités.
Pour les toilettes, il y avait un mix de toilettes chimiques avec des toilettes sèches avec latrines à puits forés.
Les eaux usées sont évacuées en direction d’un astucieux tonneau qui filtrait la graisse des eaux afin de limité le risque prolifération des moustiques. Enfin les ordures ménagères étaient collectées dans des poubelles prévues à cet effet.
Pour ce qui est des déchets spécifiques (médicaux et électroniques) nous avions un circuit indépendant de collectes qui repartait en bateau avec ces déchets en Guadeloupe dans des décharges appropriés.

La santé :
Nous assurions l’essentiel des soins. Pour le choléra nous avions à notre disposition différentes thérapeutique en fonction du médecin.
Comme annoncés plus haut, notre stock de médicaments étaient parfois limités, mais dans l’ensemble nous n’avons pas vraiment rencontré de problèmes.
Nous avions des moustiquaires traités pour dormir ou pour vivre dans nos tentes. Il faut particulièrement être vigilant à ce niveau pour ne pas se chopper la dengue ou autre maladie transmise par les moustiques.

Les transports :
Rien de particulier à signaler. Le camp ressemblait à un petit village, on s’y déplaçait à pied en vélo. Les véhicules étaient soient des engins du génie, soit des véhicules militaires.

L’alimentation :
Il y avait un élevage de cochons et de poules, au niveau agriculture, des tomates et divers légumes du jardin (hors pomme de terre qui poussent difficilement dans nos contrées). Il y avait bien sûr beaucoup de bananier donnant des bananes jaunes, des figues pommes (petites bananes) et des bananes fruit (les jaunes tacheté de noires)
Il y avait une cuisine centrale, mais rien n’interdisait de faire sa propre bouffe. Sur place j’ai improvisé un réchaud artisanal et un grill pour me faire des repas quand j’en avais le temps. Le fait d’avoir apporté de quoi cuisiné au départ m’a fortement aidé.

Les activités :
Là par contre on ne s’ennuyait pas lol ! On chantait, on improvisait des morceaux à la guitare, sans compter les nombreux jeux de sociétés. Il y avait également quelques consoles de jeu.

La communication :
Une fois que les antennes étaient en place, j’ai pu appeler ma famille quasiment tous les jours. D’ailleurs, l’iphone est un téléphone qui aurait été parfait car il cumule pas mal d’avantage (jeux, communication, activités variés, liseuse de livre numérique …)
J’avais opté pour un netbook en guise d’ordinateur. Je n’ai pas eu à regretter mon choix.




Bilan

D’abord pour mes deux sacs je me demande encore comment j’ai fait pour ne pas partir avec un kit à couture plus important (lol). Des fois on ne pense pas forcément à ce qui est évident.

Les vêtements de sport sont vraiment adaptés à presque toutes les situations, ils sèchent vite et se lavent facilement. De plus ils sont plus confortables si il faut courir pour s’échapper ou sortir d’un bâtiment en cas de réplique sismique.

La tente m’a pas mal servi, aussi bien en tant que lieu de couchage qu’en tant que lieu de rangement et stockage. C’était aussi un espace personnel pour mon intimité.
Je pense aussi l’utiliser dans le cadre d’une station de production d’énergie portable lorsque je ferai l’acquisition d’une valise avec panneau solaire et batterie solaire.

On s’habitue assez vite au manque de confort occidental, en une ou deux semaines, on se rappelle que l’on sait faire des choses de ses dix doigts. Une table, des chaises, un abri, il suffit d’avoir de bons outils. Fan de bushcraft, j’avais ce qu’il me fallait. Il ne m’a manquait qu’une scie fil bien plus maniable qu’une scie pliante dans certaines circonstances, mais dans l’ensemble je n’ai pas eu de soucis. J4avoue que mon attirail de menuiserie m’a manqué …

Je n’ai pas eu personnellement à utiliser ma boite à pharmacie, mais pour de long voyage et dans des situations particulières j’ai revu certains éléments. J’ai rajouté des antis histaminiques, des anxiolytique/somnifères et un neuroleptique de type sédatif.
Je m’explique :
Nous étions dans un endroit particulièrement stressant et avec des répliques fortes nombreuses (parfois une dizaine par jours) et la nuit moi-même et certains de mes collègues ont eu des difficultés à dormir. Non pas à cause des secousses mais par l’angoisse de la secousse à venir.
Ensuite il y a eu un cas de BDA (bouffée délirante aiguë) suite à une situation de panique nocturne ou un de mes collègue à complètement délirer, nous n’avions rien pour le calmer à l’exception d’un somnifère qui na que très peu fait effet sur le moment.
Enfin de nombreuses personnes se sont retrouver à manger des produits qu’ils n’ont jamais consommé de leur vie, ainsi il y a eu pour certains de petits cas bénins d’allergie, un anti allergique s’est avéré nécessaire.

Du coup je rajoute dans ma liste de médicaments uniquement pour mon bob et des sorties prématurés en cas de danger imminent:
Atharax (anti histaminique, anxiolytique et pré médicamentation de l’anesthésie) son principal effet secondaire est la somnolence il est donné à l’hôpital la veille d’une opération afin de bien dormir, de limiter le risque allergique (très efficace à ce niveau d’ailleurs) et avec son effet anxiolytique il protège même le cœur pendant l’opération. Préférer les pilules de 25mg et non celle de 100mg car le but est de vous soulager, voir de vous calmer pas de vous rendre KO et donc potentiellement inopérationnel pendant votre sommeil.
http://www.eurekasante.fr/medicaments/vidal-famille/medicament-matara01-ATARAX.html

Lysanxia (anxiolytique) très utilisé, très bonne tolérance au niveau de la population soignée, aussi bien en milieu médicalisé qu’en médecine de ville. Il aide à calmé une anxiété passagère.
Attention également au risque de somnolence.
http://www.eurekasante.fr/medicaments/vidal-famille/medicament-olysan01-LYSANXIA.html

Ces deux médicaments sont des médicaments dérivés des benzodiazépines, famille très particulière de médicaments qui nécessite une présence soignante afin d’évaluer les effets. En usage courant, les benzodiazépines provoquent une dépendance.

Un sédatif qui pourra me servir dans diverses situations psychiatrique ou post traumatique comme les bouffées délirante aigue, voire de délirium tremens ou tout simplement pour me défendre en cas d’agression.


Voilà si vous avez des questions, n'hésitez pas clind'oeil
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Message par logan Mar 10 Jan 2012 - 11:51

Merci pour le retour !

creol971 a écrit:Il ne m’a manquait qu’une scie fil bien plus maniable qu’une scie pliante dans certaines circonstances
Je pensais que les scies fil avaient finalement peu d'utilité et étaient peu efficaces/maniables comparées aux scies pliantes, comme quoi .. Tu as des exemples de ces "circonstances" particulières ?
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Message par Ash Mar 10 Jan 2012 - 12:27

J'en ai un, la découpe d'objets peu accessibles, comme un tube pvc dans un angle de mur...

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Message par creol971 Mer 11 Jan 2012 - 3:05

Oui la scie fil en faite est très facilement transportable, elle était même dans mon EDC que j'avais sur place. De plus elle est parfaite pour des objets de faibles diamètres. On peut difficilement couper un tronc d'arbre avec, mais une branche ou un petit surplus de tube ça va.
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Message par Rammstein Mer 9 Mai 2012 - 13:57

J'ai quelques questions sur un sujet un peu dérangeant, puisque cela concerne la mort après le séisme...

1. Y avait-il encore beaucoup de morts à extraire des décombres quand tu es arrivé sur place, ou le travail d'extraction avait-il déjà été fait ?

2. Comment se sont organisé les survivants dans un premier temps, puis les secours, pour les extraires de là ? Je fais surtout allusion aux moyens matériels utilisés (pelle, pioche, engin de chantier, etc).

3. Comment les cadavres ont-ils été pris en charge dans les premiers jours après la catastrophe ? Via des chapelles ardentes en plein air pour l'identification par les familles, avec les inconvénients que cela suppose sous les tropiques (décomposition rapide, odeurs, fluides corporels…) ? Ont-ils été au contraire rapidement inhumés ou/et incinérés ?

4. Y a-t-il eu prépondérance de l'incinération sur l'inhumation, ou vis versa ?

5. Les personnes chargées de ce travail ont-elles adopté des mesures de protection particulières (masques, gants, etc) ?

6. Vu le nombre de victimes, les opérations de prise en charge des cadavres ont-elles provoqué des nuisances (pollution de l'eau, odeurs, fumées…) ?

Merci pour tes réponses !

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Message par creol971 Mer 6 Juin 2012 - 1:04

Me revoici (lol) je reviens après quelques mis au point perso, je m'excuse donc du retard pour la réponse.

Rammstein a écrit:J'ai quelques questions sur un sujet un peu dérangeant, puisque cela concerne la mort après le séisme...

1. Y avait-il encore beaucoup de morts à extraire des décombres quand tu es arrivé sur place, ou le travail d'extraction avait-il déjà été fait ?

Non, nous sommes arrivés à J1 (jour 1= premier jour après le séisme). Nous étions parmi les premiers, du fait de la proximité géographique de la Guadeloupe. Nous sommes arrivés en premier par bateau à Jacmel au Sud de l'île. Les autres sont arrivés par avion une fois que les légionnaires (de Guyane) et les bâtisseurs ont rendu l'aéroport opérationnel (au passage les américains sont arrivés à ce moment)

Ainsi lorsque nous sommes arrivés, de J1 à J7 les morts ont d'abord été entéré. Certains infirmiers de mon hôpital étant diacre également, ont fait un office religieux. Par la suite, de J7 à environ J 30, la plupart des morts étaient soit entéré soit brûlés par les habitants pour des raisons "d'hygiène évidente".

Rammstein a écrit:2. Comment se sont organisé les survivants dans un premier temps, puis les secours, pour les extraires de là ? Je fais surtout allusion aux moyens matériels utilisés (pelle, pioche, engin de chantier, etc).
En premier lie ce qui prime est la recherche basique de nourriture et de d'abri,vient en corollaire, la protection de la fatrie la plus proche, la plus immédiate : Ma fille avant ma nièce, ma soeur avant ma cousine etc ...
Ce qui implique que dans les recherches, les moyens utilisés ont été essentiellement "physique" avant d'être organisé. Les hommes soulevaient des blocs de pierres, des roches et tout ce qu'ils pouvaient soulever par leur propres forces physique. Une fois les secours organisé, ils y a eu un phénomène de masse. Au bout de 4 ou 5 jours, on ne cherchait plus en priorité sa famille, mais les survivants, le deuil accéléré aidant, la population locale utilisait des systèmes de bases (poulie, corde etc) combiné à des techniques plus modernes venu de l'extérieur.

Rammstein a écrit:3. Comment les cadavres ont-ils été pris en charge dans les premiers jours après la catastrophe ? Via des chapelles ardentes en plein air pour l'identification par les familles, avec les inconvénients que cela suppose sous les tropiques (décomposition rapide, odeurs, fluides corporels…) ? Ont-ils été au contraire rapidement inhumés ou/et incinérés ?
la plupart, incinéré.

Rammstein a écrit:4. Y a-t-il eu prépondérance de l'incinération sur l'inhumation, ou vis versa ?
Comme dit plus haut, pour des raisons "d'hygiène", l'incinération a été préféré à l'inhumation. Le manque de place y a joué pour beaucoup aussi. On ne peut bâtir, par la suite, sur un immense cimetière.

Rammstein a écrit:5. Les personnes chargées de ce travail ont-elles adopté des mesures de protection particulières (masques, gants, etc) ?
Autant que je sache non. les haïtiens ont une forte proportion au magico religieux. Une prière, un sacrifice est plus efficace qu'une paire de gant dans leur croyance. Le SIDA par exemple n'est pas une maladie, mais un sort que l'on vous jette.

Rammstein a écrit:6. Vu le nombre de victimes, les opérations de prise en charge des cadavres ont-elles provoqué des nuisances (pollution de l'eau, odeurs, fumées…) ?
Oh que oui ! il est impossible de stocker 100 000 cadavres, et encore moins d'en enstérer autant d'un coup. Les plus chanceux ont eu un enterrement religieux, c'est à dire dans ce pays, un enterrement plus ou moins convenable. Pour les autres, il y a une avenue de 50 km avec 30 000 corps enterré. Pour les autres, il y eu certainement eu divers trafics d'organes, règlements de compte, séquestration, viols etc ...
Nous ne sommes pas certains que tous les morts soient dues aux séismes, ni même que ceux portés disparues soient vraiment morts ...
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